Tomber 7 fois, se relever 8...
Encore une journée rude dans le monde de la recherche. Une personne de plus qui a l'insouciance agressive de me prendre pour une idiote inconséquente sans chercher à replacer les faits dans leur contexte, se demander si je suis vraiment une écervelée ou si il n'y aurait pas un "pourquoi du comment" à explorer avant de me rentrer dans le lard. Y mettre les formes, c'est superflu. Efficacité au pouvoir, laminage en règle, accommodé d'un jugement sur ma personne et mes capacités tout aussi peu subtil.
Chère N., merci pour tes remarques sur mon article, avec lesquelles je suis totalement d'accord. Je ne reviendrai pas sur le fait que la récurrence et le détail de celles-ci m'ont à plusieurs reprises laissés penser que tu devrais écrire ces quelques pages toi-même. Sache juste que chaque sujet abordé, chaque phrase et sa tournure étaient réfléchis et prenaient sens dans le cadre de consignes préalables plus ou moins précises (c'est pas grave, je ne tire pas sur le messager).
Si l'article est si peu pétillant, c'est qu'on m'a demandé de faire trois pages, en d'autres termes un résumé dont le lissage dû, dans un premier temps, à la réduction du propos a été accentué pour cause de sensibilités diverses et nombreuses à ménager. Le texte a peu d'envergure, je ne manque pas d'ambition. Ce sont deux choses différentes.
Peut-être aurais-tu pu prendre la peine de te renseigner sur ce processus avant d'ouvrir le tir. Merci néanmoins de m'avoir, en parole, pris par la main comme une enfant en manque de confiance pour me faire découvrir que j'étais capable d'en avoir, de l'ambition. Comme au bout du compte, cela reste le moment le moins abrupt et désagréable de la conversation, j'essaye de l'apprécier à sa juste valeur.
Par ailleurs, dans l'attente de vos commentaires, je pensais partager avec vous l'idée que cette première version de mon texte n'était pas parfaite ni définitive, je ne m'attendais donc pas à des jugements aussi expéditifs. Heureusement que C. ne m'a pas envoyé tes remarques par mail, parce que je ne serais par venue à cette réunion.
Encore une journée rude dans le monde de la recherche. Dans le découragement que je ressens ces temps-ci, j'ai exprimé à plusieurs reprises l'idée que peut-être je ne suis pas heureuse dans ce que je fais par cette phrase: "Je me lève avec l'impression d'être une merde et je me couche avec l'impression d'être une merde". (En effet, dans un milieu basé sur la lutte d'egos intellectuels*, sans aucune distance entre ta production et ta personne, sans projet à porter ou équipe dans laquelle s'insérer, il faut avoir les épaules solides. Et parfois je ne suis pas sûre de les avoir ni que le jeu en vaut vraiment la chandelle). Cette réunion m'a rappelé fort à propos que la sensation n'était pas uniquement présente le matin et le soir, mais pouvait aussi survenir en plein milieu d'une journée. Et si j'ai parfois du mal à me réveiller pour travailler, c'est tout aussi difficile de se remettre à l'ouvrage après ce genre de réunion. Concentration à zéro, envie de se rouler en boule à + 1000.
D'ailleurs je ne travaille pas, j'écris ici.
Un jour, je le redis, il faudra que je dise pourquoi je suis là, pourquoi je reste. Sinon personne ne peut comprendre pourquoi je ne claque pas la porte. Il y a du pour à côté du contre et tous mes doutes, ce qui vient légèrement complexifier la situation.
* Sans compter que cette propension à se voler dans les plumes - et d'autres petites choses- fait qu'en 3 ans je n'ai été fière de rien de ce que j'ai pu faire. Une vraie épreuve pour l'estime de soi. A ce rythme, je commence à penser qu'à l'université, il vaut mieux faire son baptême et obéir à deux-trois "gueules en terre" que faire une thèse.